Auteure
Géraldine Foin
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Résumé court
Afin d’améliorer la compréhension de l’influence d’Internet sur l’implication dans le travail scolaire des étudiants de premier cycle universitaire, une méthodologie complémentaire aux données classiques des sciences sociales (journal de bord, questionnaire, entretien) doit être envisagée. La technique de recueil de données présentée permet d’établir des informations précises sur les activités numériques lors de cours et de sessions de travail des étudiants. Elle permet de dégager une typologie des comportements numériques et d’établir un quelconque lien entre le comportement numérique et l’implication dans le travail scolaire.
Mots clés
Méthodologies; Environnements; Ingénierie pédagogique
Résumé long
Introduction
Le but de cette communication est de présenter une technique de recueil de données qui peut améliorer la compréhension de l’implication scolaire dans un contexte numérique. La possibilité d’accéder aux données liées à l’environnement numérique des étudiants peut permettre de répondre aux questions sur l’influence d’Internet sur leur implication scolaire. Ce sont généralement les jeunes (15 – 25 ans) qui sont les plus touchés par les pratiques numériques, ils participent à une grande variété d’activités numérique (Donnat, 2009; Tisseron, 2008). Dans ce contexte, Internet peut devenir soit un soutient dans les études de ces jeunes, de nombreuses universités publient des cours en ligne ou proposent aux étudiants un Espace Numérique de Travail; soit une tentation qui peut empiéter sur leur concentration par l’envie de consulter sa boîte mail, de jouer à une infinité de jeux en ligne, etc. Plusieurs étudiants ont participé à notre enquête, seules les données d’activités de trois d’entre eux seront présentées, afin de mettre en avant différents contextes de connexion. Les contextes de connexion peuvent influencer le comportement numérique des étudiants, sont-ils plus concentrés lors des cours ou lorsqu’ils travaillent chez eux?
Le cas de Framboise
Framboise est un étudiant de dix-neuf ans inscrit à l'Université de Lorraine. Prenant son ordinateur avec lui durant les cours, ce sont deux sessions de prise de notes qui seront présentées. Nous allons comparer un cours magistral de statistiques appliquées à la psychologie (lundi de 12 h à 14 h) et un cours de travaux dirigés théorique (jeudi de 17 h à 20 h). Rappelons que le lundi n’est pas un jour favorable à la concentration, en effet avec la coupure de la fin de semaine, cette période peut s’avérer difficile pour les étudiants, ce qui n’est pas le cas du jeudi. Les créneaux horaires semblent également défavorables à l’attention, le premier a lieu lors de la pause midi, ce qui est synonyme de relâchement avant d’entreprendre la suite de la journée et le second a lieu le soir, suite à toute une journée de travail déjà réalisée. De plus, l’environnement où a lieu les enseignements peut influencer leur comportement numérique et leur concentration scolaire, un cours ayant lieu dans un amphithéâtre au milieu de centaines d’autres étudiants et l’autre se déroulant dans un espace plus restreint avec une vingtaine d’individus. Par comparaison, on peut supposer que Framboise sera concentré lors du cours magistral, et plus inattentif lors de l’enseignement dirigé. Ce sont les cours du lundi 24 février 2014 et du jeudi 20 mars 2014 qui seront présentés.
Le cas de Syl
Syl est un étudiant de vingt-deux ans inscrit à l’Université Laval. Ne prenant pas son ordinateur avec lui durant les heures d’enseignement, ce sont les sessions de travail à la maison qui seront étudiées. La période qui sera présentée a lieu le vendredi 25 avril 2014, on peut remarquer une session de travail de 8 h 21 à 10 h 16.
Le cas de Lilou
Lilou est une étudiante de vingt ans inscrit à l’Université de Lorraine, dont les sessions de travail à la maison seront étudiées. Une journée sera présentée en particulier, en effet pendant le mardi 6 mai 2014, Lilou va travailler à plusieurs reprises sur ses dossiers, lors d’une session dans la matinée et une autre en pleine après-midi.
Conclusion
La technique de recueil des données présentée va permettre d’améliorer la compréhension des pratiques numériques dans un contexte scolaire, mais également rendre compte du phénomène de la multiconnexion et de la multitâche à base numérique chez les étudiants. En effet, l’association de ces données avec des entretiens ou questionnaires, va permettre aux chercheurs d’affiner leurs connaissances sur l’environnement numérique des étudiants.
Finalement, on peut voir à travers les participants, qu’ils ont des digressions sur Internet par intervalles de quinze à vingt minutes, que ce soit en cours ou lors de travail fait à la maison. Ils semblent être connectés en continu, cela s’explique par la présence au quotidien de l’environnement numérique de ces jeunes, emportant Internet partout avec eux, à l’aide de différents écrans de connectivité (smartphone, tablette tactile, etc.).
Ne voulant pas diaboliser l’influence d’Internet dans l’enseignement supérieur, il apparaît que ce dernier peut être source de soutien scolaire, mais également de tentation dans des univers artificiels, notamment par la connexion au réseau social Facebook qui offre la possibilité aux étudiants d’avoir un peu de répit. Ce n’est que l’implication des étudiants dans leurs études qui peut déterminer la place qu’a Internet dans leur quotidien. Un étudiant qui peut être très connecté peut utiliser Internet à bon escient en fonction de son implication scolaire. Internet offre une multitude d’activités diverses et variées, mais ce n’est qu’une question de choix qui peut orienter un individu vers la tentation de s’évader dans des mondes artificiels ou de renforcer ses connaissances à l’aide d’informations virtuelles. Plutôt que de chercher à limiter la consommation d’Internet, car il semblerait que l’absence d’Internet peut en dérouter plus d’un, il serait plutôt envisageable d’enseigner à ces jeunes un comportement numérique contrôlé. Un enseignement où les digressions sur le net ne sont pas stigmatisantes, car la concentration sur une tâche ne peut excéder un certain laps de temps (Ellemberg, 2012; Jeunier et Delvolve, 1999), mais que cet échappatoire virtuel soit contrôlé et n’empiète pas la tâche à accomplir. Pour les plus connectés, ce sont de nouvelles habitudes numériques qui devront être envisagées afin de permettre d’harmoniser leur besoin de connectivité et les tâches scolaires à accomplir.
Références bibliographiques
Coulon, A. (2000). Le métier d'étudiant : l'entrée dans la vie universitaire, Revue française de pédagogie, vol 131, n°1, pp. 138 - 139.
Donnat, O. (2009). Les pratiques culturelles des Français à l'ère numérique - Éléments de synthèse 1997-2008, Culture études, volume 5, pp. 1-12.
Ellemberg, D. (2012). Les difficultés et les troubles d’apprentissage, CENTAM, Clinique d’Évaluation Neuropsychologique et des Troubles d’Apprentissage de Montréal (www.centam.ca).
Fournier, P. et Arborio, A-M. (2010). L'observation directe : L'enquête et ses méthodes, Paris : Armand Colin.
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Tisseron, S. (2008). Virtuel, mon amour. Penser, aimer, souffrir, à l'ère des nouvelles technologies, Paris : Albin Michel.